Ce pesticide ultra-toxique a été utilisé pendant plus de vingt ans dans les bananeraies en Guadeloupe et Martinique. Il a contaminé sols, rivières, bétail, poissons, crustacés, légumes-racines… et la population elle-même.
Les Antillais sont au cœur d’un combat pour faire reconnaître la dangerosité de la chlordécone. Présent en Martinique et Guadeloupe, cet insecticide cancérogène et perturbateur endocrinien présent dans les sols, va générer une pollution pendant plusieurs siècles.
Elle a longtemps été considérée comme indispensable à la culture des bananes, l’un des secteurs économiques principaux des Antilles. Dans une enquête au long cours, Le Monde fait un état des lieux sur cet insecticide « miraculeux » aux conséquences catastrophiques. Apparu en 1972, il est aspergé sur les bananeraies afin de lutter contre le charançon du bananier, responsable de dégâts considérables.
Interdite en France en 1990, mais utilisée jusqu’en 1993 par dérogation aux Antilles, elle est, depuis, toujours présente dans les sols et peut se retrouver dans certaines denrées d’origine végétale ou animale, et certains captages d’eau.
Des sols pollués pendant des centaines d’années
Selon Le Monde, la quasi-totalité des Guadeloupéens (95 %) et des Martiniquais (92 %) sont contaminés à la chlordécone, selon une étude publiée en 2013 par Santé publique France. Plus grave, « le pesticide est aussi fortement soupçonné d’augmenter le risque de cancer de la prostate, dont le nombre en Martinique lui vaut le record du monde, et de loin, avec 227,2 nouveaux cas pour 100.000 hommes chaque année », explique l’article. Elle est également soupçonnée d’effets négatifs sur le développement des bébés. La chlordécone est éliminée en quelques semaines par le corps. Mais aux Antillles, impossible d’y échapper. Elle pourrait être présente dans les sols pendant des centaines d’années.
« Il faut que les scientifiques trouvent une solution pour éliminer la molécule », a insisté Ary Chalus, président de la région Guadeloupe, en avril 2018 lors d’une réunion au ministère des Outremer. « Il faut mettre les moyens sur la dépollution. Quand on entend que (la pollution peut durer) 300 ans, 500 ans, c’est inacceptable », a renchéri Serge Letchimy, député martiniquais. Ils semblent avoir été entendus. Le gouvernement a annoncé un colloque sur l’état d’avancement des recherches sur le sujet, entre le 16 et le 19 octobre en Martinique, une première.
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