Réunis en séance plénière le mardi 30 avril dernier, les membres du conseil territorial ont débattu longuement sur les deux délibérations à l’ordre du jour à savoir le droit de préemption statutaire et urbain.
Mais qu’est-ce que ce droit de préemption pour lequel la Collectivité de Saint-Martin se bat autant ? Il s’agit d’un droit qui permet à la COM de se porter acquéreur en lieu et place de l’acheteur dans le cadre d’une vente (bien immobilier, terrain, etc). Dans les zones à préempter, le vendeur d’un bien a l’obligation de le présenter d’abord à la Collectivité, et ce, dans le but de favoriser l’aménagement urbain. Ce 30 avril 2024, le conseil territorial de Saint-Martin a voté en faveur de l’institution du droit de préemption statutaire et urbain. Le premier concerne les transferts entre vifs de propriétés foncières sur le territoire dont les propriétaires devront déclarer préalablement la mise en vente à la COM qui décidera d’exercer ou non son droit de préemption dans un délai de deux mois. Le déclarant aura le même délai pour accepter l’offre faite par la COM, que le prix soit égal à son offre ou différent. S’il refuse, la COM se réserve le droit de saisir la juridiction compétente en matière d’expropriation dans le délai de 15 jours. Ne sont pas concernés par cette mesure qui renforce l’arsenal de la Collectivité avec pour objectif de « rétablir de l’ordre là où le désordre semble prévaloir et d’améliorer la cohésion sociale » (propos du président Mussington) : les personnes justifiant d’une résidence fiscale de 5 ans à Saint-Martin ou liées à un résident fiscal par le mariage, le pacs ou en concubinage pour la même durée. En raison des délais à respecter, il en reviendra au conseil exécutif de traiter les dossiers de préemption, même si ce droit appartient au conseil territorial. Lors des débats, les rangs de l’opposition ont demandé une discussion plus élargie face à l’enjeu : « Quand on est sur des sujets aussi sensibles, on fait une consultation publique (…). Il y a un manque de sérieux sur la façon de faire les choses » déclarait Daniel Gibbs. Le conseiller territorial Alain Gros-Desormaux questionnait quant à lui la majorité sur la procédure pour rétrocéder les terrains acquis aux jeunes saint-martinois : « Demain nous aurons à définir une politique, ensemble ». Pour le 1er vice-président Alain Richardson, il en va de défendre ‘the greater good’, en faisant le choix le plus judicieux pour préserver le foncier et le collectif des Saint-Martinois. Concernant la seconde délibération qui vise à augmenter la capacité de logement et à asseoir une stratégie patrimoniale, l’institution du droit de préemption urbain a obtenu, comme pour la 1ère délibération, 16 voix favorables. L’opposition n’a pas participé aux votes, choisissant de quitter la salle du conseil territorial à l’issue des premiers débats afin de montrer leur désaccord sur la méthode qu’elle juge précipitée. _Vx
SUCCESSION BEAUPERTHUY
Ces deux délibérations extraordinaires sont, sans surprise, liées au dossier sur la succession Beauperthuy qui est revenu au cœur des débats au travers des propos de Louis Mussington : « C’est (ces délibérations ndlr) nécessaire (…), ce qui est en train de se faire au travers de cette vente aux enchères complique encore plus ce désordre foncier. Nous avons le droit moral et politique de réagir vite pour préserver notre patrimoine et sauvegarder l’intérêt des futures générations, nous agissons avec le sens de la responsabilité et du devoir ». Cette approche n’est pas la bonne selon Jules Charville, leader de Generation Hope, qui regrette que le président de la COM n’ait pas respecté les délais pour déposer une offre de rachat auprès de l’administrateur judiciaire en charge du dossier : « Nous sommes ici parce que la vente aux enchères approche, le président devrait être à la table des négociations avec le préfet (qui devait rencontrer l’administrateur judiciaire le 30 avril dernier à Paris en tant que médiateur missionné par la ministre déléguée des outre-mer ndlr), pas ici à débattre de ça ». Le potentiel rachat des trois parcelles par Terres Caraïbes, Établissement Public Foncier Guadeloupe – Saint-Martin a également été contesté par l’opposition. Remarques prises en compte par le président de la COM. En guise de conclusion des débats, Alain Richardson a ajouté : « Pour certains il y a précipitation, mais il n’est jamais trop tôt ou trop tard pour faire ce qui est nécessaire. Avec ces outils, le territoire pourra mieux exercer ce droit (de préemption ndlr) » même si la Collectivité assure qu’elle ne l’exercera pas systématiquement.
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